Devenir auto-entrepreneur : les activités formellement interdites
Le régime de l’auto-entreprise, désormais appelé micro-entreprise, séduit chaque année des milliers de Français souhaitant se lancer à leur compte. Sa simplicité administrative, sa rapidité de création, et son système fiscal allégé en font un tremplin idéal pour tester une activité indépendante.
Cependant, contrairement à ce que certains pourraient croire, ce régime ne permet pas de tout faire. Certaines activités sont expressément exclues du statut, pour des raisons sociales, juridiques ou réglementaires. Mieux vaut les connaître avant de se lancer pour éviter les mauvaises surprises.
Pourquoi certaines activités sont interdites ?
Si le régime micro-entrepreneur se veut accessible, il ne convient pas à toutes les professions. Plusieurs raisons expliquent cette exclusion :
- Une réglementation trop stricte : Certains métiers, comme ceux du droit ou de la santé, sont encadrés par des textes législatifs imposant des obligations précises (diplômes, ordres professionnels, déontologie…). Le régime micro, trop souple, ne permet pas de les respecter correctement.
- Des caisses de cotisation spécifiques : De nombreuses professions (agriculteurs, professions médicales, juridiques…) dépendent de régimes sociaux particuliers, comme la MSA ou des caisses autonomes, qui ne sont pas compatibles avec le régime micro-social simplifié.
- Un mode de rémunération incompatible : Certaines activités (notamment artistiques) impliquent des formes de rémunération comme les droits d’auteur ou les commissions sur volume, qui ne peuvent être intégrées dans la fiscalité forfaitaire de la micro-entreprise.
- La nécessité de protéger le public : Certains métiers sont jugés sensibles et requièrent des garanties élevées, comme des assurances obligatoires, des qualifications certifiées ou une déontologie professionnelle. Le régime de la micro-entreprise ne peut pas toujours garantir cette protection.
Les grandes catégories d’activités interdites
1. Les professions juridiques et judiciaires
Il est impossible d'exercer une profession liée au droit sous le régime micro. Cela concerne :
- Avocat
- Notaire
- Huissier de justice
- Administrateur judiciaire
- Mandataire judiciaire
- Greffier
- Commissaire-priseur
Ces métiers nécessitent une inscription à un ordre professionnel, une responsabilité renforcée et des assurances obligatoires. Le régime simplifié ne permet pas d’en assurer correctement l’encadrement.
2. Les professions de santé
Les professions médicales et paramédicales réglementées sont également exclues. Cela inclut notamment :
- Médecin
- Infirmier
- Chirurgien
- Pharmacien
- Sage-femme
- Kinésithérapeute
- Vétérinaire
- Orthophoniste
- Psychologue clinicien
- Pédicure-podologue
Ces métiers imposent une inscription à un ordre (Ordre des médecins, Infirmiers, etc.), une responsabilité médicale importante, et des cotisations spécifiques. En revanche, les professionnels du bien-être (sophrologues, réflexologues…) ou les diététiciens peuvent exercer sous conditions.
3. Les activités agricoles
Toutes les activités agricoles dépendant de la MSA sont incompatibles avec la micro-entreprise :
- Élevage
- Maraîchage
- Pisciculture
- Activités forestières
- Hébergement à la ferme
Seules certaines prestations annexes (petit jardinage dans le cadre des services à la personne) sont tolérées si elles restent marginales et bien distinctes.
4. Les activités immobilières
Le régime micro-entreprise n’est pas adapté aux métiers soumis à la TVA immobilière. Parmi eux :
- Agent immobilier
- Marchand de biens
- Lotisseur
- Loueur d’immeubles non meublés ou à usage professionnel
En revanche, l’administration ou la gestion d’immeubles peut être exercée sous ce statut, tout comme certaines activités liées à la location meublée sous conditions.
5. Les professions comptables, financières et de l’assurance
Certaines activités financières imposent des exigences de responsabilité et des affiliations à des caisses spécifiques :
- Expert-comptable
- Commissaire aux comptes
- Conseiller en investissement
- Agent général d’assurances
Le régime micro-entreprise ne permet pas, par exemple, de cotiser à la CAVEC ou à la CAVAMAC, rendant ces professions incompatibles.
6. Les artistes-auteurs rémunérés en droits d’auteur
Les artistes relevant de la Maison des artistes (MDA) ou de l’Agessa ne peuvent pas exercer en auto-entrepreneur si leur rémunération provient des droits d’auteur :
- Peintres
- Auteurs
- Compositeurs
- Photographes d’art
- Musiciens de scène
Toutefois, des activités proches peuvent être exercées sous ce statut à condition d’être rémunérées sous forme d’honoraires. Un photographe de mariage ou un professeur de musique à domicile, par exemple, peut être auto-entrepreneur.
7. Autres professions spécifiques interdites
Certaines activités, bien que moins connues, sont aussi exclues du régime :
- Journaliste titulaire d’une carte de presse
- Interprète de conférence
- Agent privé de recherches (détective)
- Trader opérant sur les marchés à terme, options ou bons d’option
- Loueur de bateaux ou véhicules de plaisance
Ces activités nécessitent souvent un cadre contractuel spécifique ou une régulation particulière (presse, marché financier, transport…).
Peut-on cumuler plusieurs activités sous ce statut ?
Oui. Il est tout à fait possible de combiner plusieurs activités au sein d’une même micro-entreprise, à condition qu’elles soient toutes autorisées par le régime.
L’auto-entrepreneur devra :
- Déclarer une activité principale
- Préciser les activités secondaires
- Respecter un seul seuil de chiffre d’affaires global (77 700 € pour les prestations de services, 188 700 € pour l’achat-revente)
En cas de dépassement ou d’activité interdite, le régime peut être remis en cause.
Que risque-t-on à exercer une activité interdite ?
Les conséquences peuvent être sérieuses :
- Radiation immédiate du statut auto-entrepreneur
- Redressement fiscal et régularisation des cotisations sociales
- Refus de couverture d’assurance (impossibilité d’indemnisation en cas de sinistre)
- Sanctions disciplinaires ou pénales (pour les professions réglementées)
D’où l’importance de vérifier en amont la compatibilité de son activité avec le régime micro-entreprise, en consultant l’Urssaf, la MSA ou son ordre professionnel.
Une assurance professionnelle reste indispensable
Même si certaines activités ne peuvent pas être exercées sous ce statut, d’autres restent exposées à des risques (erreur, litige client, accident, cyberattaque…). Dans tous les cas, il est fortement recommandé de souscrire une assurance RC Pro adaptée à son activité pour se protéger des conséquences financières d’un sinistre.
L’assurance permet aussi de rassurer ses clients et partenaires sur son sérieux et son engagement professionnel, en particulier dans les secteurs techniques ou de conseil.
Le statut de la micro-entreprise offre une voie simplifiée vers l’indépendance, mais il n’est pas universel. Certaines activités restent interdites en raison de leur complexité juridique, sociale ou réglementaire. Ignorer ces règles expose à des sanctions importantes.
Avant de créer votre activité, vérifiez attentivement sa compatibilité avec ce régime. Et si votre projet ne correspond pas aux critères du micro-entrepreneur, tournez-vous vers un autre statut juridique, plus flexible mais aussi plus exigeant (EURL, SASU…).
Enfin, protégez votre activité avec les assurances adaptées, même lorsque ce n’est pas obligatoire. C’est une précaution souvent sous-estimée, mais essentielle pour exercer sereinement.