Assurance chômage  la réforme choc en 2025 , et si tout le monde devenait auto-entrepreneur

Assurance chômage : la réforme choc en 2025 , et si tout le monde devenait auto-entrepreneur ?

Publié le 16/06/2025 11:42 | Mis à jour le 16/06/2025 17:05 | 7 min de lecture

La réforme annoncée par le ministre de la justice sur l’assurance chômage marque un tournant important dans la politique de l’emploi en France. Envisagée dans le cadre du futur programme présidentiel de 2027, cette mesure prévoit de réduire de moitié la durée maximale d’indemnisation, la faisant passer de 18 à 9 mois, voire 6 mois dans certaines situations.

Présentée comme une réponse à la crise budgétaire, cette réforme alimente un débat de fond sur le rôle et les limites de la solidarité nationale, et sur la meilleure manière d’inciter au retour à l’emploi. Mais que faut-il vraiment en retenir ? Quels changements concrets pour les demandeurs d’emploi, les actifs précaires, les seniors, ou les entrepreneurs ? On fait le point.

 Contexte : pourquoi une nouvelle réforme du chômage ?

Depuis 2023, l’assurance chômage a déjà connu des évolutions importantes :

  • Durée d’indemnisation réduite de 25 % en cas de baisse du chômage national (actuellement autour de 7,5 %).
  • Montant de l’allocation révisé pour certains profils, notamment ceux ayant des parcours discontinus.
  • Durcissement des conditions d’accès (il faut avoir travaillé 6 mois sur les 24 derniers mois pour ouvrir des droits).

La nouvelle proposition va plus loin. Selon Gérald Darmanin, il ne s’agit plus seulement d’ajuster le système, mais de “forcer les gens à retourner travailler”, dans une logique assumée de conditionnalité des aides sociales. Cette logique rejoint d'autres orientations gouvernementales : RSA conditionné à 15 heures d’activité hebdomadaire, réforme de France Travail, etc.

 Ce que propose la réforme

 Ce que l’on sait à ce stade :

  • Durée d’indemnisation réduite à 9 mois maximum pour la plupart des demandeurs d’emploi (au lieu de 18 mois actuellement pour les moins de 53 ans).
  • Une fourchette entre 6 et 9 mois pourrait s’appliquer, selon le taux de chômage ou le secteur concerné.
  • Exceptions prévues si le demandeur ne reçoit aucune offre “raisonnable” d’emploi.
  • Pas de changement annoncé pour le moment sur le montant de l’allocation (ARE), mais cela pourrait évoluer selon les arbitrages budgétaires.

 Ce que cela remet en cause :

  • Le principe assurantiel de l’assurance chômage (droits en fonction des cotisations).
  • La possibilité de se reconstruire professionnellement après un licenciement ou une rupture de contrat.
  • La sécurité financière des travailleurs seniors ou des jeunes diplômés sans réseau.

 Qui est concerné ?

 Les jeunes actifs

  • En 2024, près de 36 % des allocataires de moins de 30 ans ne retrouvent pas d’emploi avant la fin de leurs droits.
  • Une réduction à 6 ou 9 mois d’indemnisation accélère la précarisation, surtout dans des secteurs instables (événementiel, hôtellerie, contrats courts).
  • Risque : enchaîner petits boulots non choisis faute de temps pour se former ou construire un projet.

 Les seniors

  • À partir de 55 ans, le retour à l’emploi devient plus difficile (chiffres Dares : seulement 45 % retrouvent un emploi stable dans l’année suivant un licenciement).
  • Actuellement, la durée d’indemnisation est allongée (jusqu’à 27 ou 36 mois) pour les plus de 53 ans.
  • Le projet Darmanin n’évoque pas clairement s’il maintient cet allongement. S’il est supprimé, cela pourrait forcer certains à basculer prématurément à la retraite — avec des droits réduits.

 Les indépendants et porteurs de projet

  • De plus en plus de chômeurs se lancent dans la création d’entreprise via l’ARCE (versement partiel des droits).
  • Mais avec moins de droits initiaux, l’aide devient mécaniquement plus faible (puisqu’elle est calculée sur le solde d’ARE).
  • La réforme encourage indirectement à créer son activité plus vite, mais avec moins de filet de sécurité.

 Quelles alternatives concrètes ?

1. Anticiper avec le cumul emploi-chômage

Le cumul ARE + emploi à temps partiel reste possible, dans la limite du salaire antérieur. Une solution souvent sous-utilisée, mais qui prolonge les droits tout en gardant un pied dans l’emploi.

2. Se former intelligemment

Les CPF (Compte Personnel de Formation), PTP (Projet de transition professionnelle) ou dispositifs régionaux peuvent vous permettre de repartir sur un métier porteur (IA, santé, numérique, bâtiment...).

3. Créer une activité avant la réforme

Si votre projet est mûr, lancez-le avant 2025 pour profiter encore du régime actuel : durée d’indemnisation plus longue, ARCE plus avantageuse.

4. Étudier le portage salarial

Moins risqué que l’autoentrepreneuriat, il permet de facturer comme un indépendant tout en conservant un statut de salarié. Une bonne solution de transition.

5. Se faire accompagner

France Travail (anciennement Pôle emploi) propose un accompagnement personnalisé. Bénéficier d’un coach emploi, d’un conseiller en reconversion ou d’un financement de formation peut faire la différence dans un marché plus tendu.

 Le débat public : pour ou contre ?

Les arguments du gouvernement :

  • Réduction des dépenses publiques (l’assurance chômage coûte environ 38 milliards d’euros par an).
  • Incitation à reprendre plus rapidement un emploi.
  • Réorientation des moyens vers d'autres secteurs jugés prioritaires (sécurité, justice, éducation).

Les critiques des syndicats et économistes :

  • Risque d’exclusion accrue pour les plus fragiles.
  • Stigmatisation des chômeurs, accusés implicitement d’“assistanat”.
  • Incohérence avec les objectifs de transition écologique, qui exigent des formations longues.

À retenir pour 2025

  • Mise en œuvre possible après les élections de 2025 ou 2026, selon les résultats politiques.
  • Pas encore de texte de loi, mais une orientation forte qui influence déjà les arbitrages internes (budget 2025, réforme France Travail, etc.).
  • Le climat politique pourrait déterminer l’ampleur réelle de la réforme.

Les nouvelles règles d’indemnisation rendent-elles plus accessible la reprise d’une activité indépendante ?

Les nouvelles règles d’indemnisation du chômage, en vigueur depuis le 1er avril 2025, n’ont pas pour objectif principal de rendre la reprise d’une activité indépendante plus accessible. Au contraire, elles encadrent plus strictement les conditions et limitent certains avantages, tout en maintenant la possibilité de cumuler allocation chômage et revenus d’activité indépendante, sous conditions.

Points clés des nouvelles règles

  • Cumul ARE et revenus non-salariés limité à 60 % des droits restants : Désormais, un demandeur d’emploi créant ou reprenant une entreprise peut cumuler ses allocations avec ses revenus d’activité indépendante, mais seulement jusqu’à 60 % du reliquat de ses droits à l’ARE. Au-delà, l’indemnisation cesse, sauf décision exceptionnelle d’une instance régionale.
  • Obligation de cesser l’activité pour reprendre ses droits ARE : Si l’activité indépendante s’arrête, il n’est possible de reprendre le versement de l’ARE qu’après avoir effectivement cessé toute activité non salariée, et après un délai de carence.
  • Versement de l’ARCE conditionné : Le second versement de l’aide à la reprise ou à la création d’entreprise (ARCE) est désormais soumis à la condition de ne pas exercer de CDI à temps plein.
  • Contrôle renforcé de l’activité : Les bénéficiaires doivent prouver régulièrement qu’ils exercent bien une activité non salariée pour continuer à percevoir une partie de leurs droits.

Accessibilité : plus d’encadrement, moins de souplesse

  • Moins de souplesse : Les plafonds de cumul et la nécessité de justifier l’activité rendent le dispositif moins souple qu’auparavant pour tester ou démarrer une activité indépendante tout en sécurisant ses revenus.
  • Maintien des dispositifs : Malgré ces restrictions, les principaux dispositifs d’aide (ARE, ARCE) sont maintenus, ce qui permet toujours aux demandeurs d’emploi d’envisager la création ou reprise d’entreprise avec un filet de sécurité.

Adaptation ou précarisation ?

Cette réforme potentielle modifie profondément la manière dont on conçoit le chômage en France. Il ne s’agit plus seulement d’un temps de transition et de sécurisation, mais d’un levier d’incitation économique. Cela suppose une capacité d’adaptation rapide de la part des citoyens… mais pose aussi la question de l’équité des parcours.

D’ici là, le meilleur conseil pour les demandeurs d’emploi est de se préparer à l’avance : explorer ses droits, se former, diversifier ses options professionnelles. Car avec moins de droits, chaque décision comptera davantage.