Anna Stépanoff et la Wild Code School montrent la voie à l’éducation de demain

Publié le 08/03/2017 17:15 | Mis à jour le 09/09/2022 17:47

A l’occasion de la Journée de la Femme Digitale (#JFD17) le 9 mars prochain, nous vous présenterons plusieurs portraits de femmes dirigeantes durant le mois de mars. Nous partagerons leurs parcours, leurs conseils et leur expérience de l’entrepreneuriat. Après l’interview de Sylvaine Pascual, de Maelle Chassard ou encore de Charlotte Husson, voici l’interview d’Anna Stépanoff. Cette entrepreneure a créé la Wild Code School, une école de code formant au métier de développeur. Découvrez son parcours et sa vision sur l’éducation de demain.

1. Bonjour Anna, parlez-nous de votre parcours !

J’ai 34 ans et je suis d’origine biélorusse. J’ai fait mes études supérieures dans 3 pays : tout d’abord en Biélorussie, puis j’ai fait un Bachelor of Arts à Harvard en 3 ans et enfin j’ai passé le concours de l’ENS où j’ai passé ma thèse. A la base, je souhaitais faire une carrière de professeur universitaire. Suivant une thèse, j’ai également donné des cours dans une université parisienne mais j’ai été déçue par le format trop classique de la formation universitaire. J’avais énormément d’idées pour changer le système mais cela me paraissait trop compliqué. J’ai donc quitté cette voie et j’ai travaillé dans le cabinet de conseil McKinsey. En 2013, j’ai décidé de me lancer dans l’entrepreneuriat et plus particulièrement dans l’innovation éducative.

2. Quel est le concept de la Wild Code School ?

Mon idée était de créer une structure différente, efficace, s’appuyant sur les compétences numériques relatives au marché de l’emploi actuel. Je me suis alors associée avec Romain Cœur pour fonder la Wild Code School en Octobre 2014. L’apprentissage est basé sur des modules innovants pour former au mieux au métier de développeur. L’admission se fait sans condition de diplômes. Les sessions durent 5 mois et il y a deux sessions par an. Nous sommes allés à contre-courant en installant notre école à la campagne plutôt qu’à Paris. Nous bénéficions des locaux d’un ancien collège juste à côté de la gare SNCF et près de la forêt dans la petite ville de La Loupe. Ce sont de grands bâtiments permettant même aux élèves de suivre leur cursus en internat.

3. Quelles sont vos perspectives de développement ?

Aujourd’hui la petite école est devenue un réseau d’écoles. Nous avons 28 élèves à La Loupe et autour d’une trentaine dans nos autres écoles. Ils sont en tout 150 dans l’ensemble de nos 6 écoles. En septembre, nous ouvrirons une école à Paris. Nous souhaiterions développer un réseau national puis international formant aux métiers du numérique.

4. D’après notre étude, 46% des femmes pensent que notre système éducatif actuel n’encourage pas les rêves individuels, qu’en pensez-vous ?

Le système éducatif aujourd’hui, en dehors du système français, est en décalage par rapport à ce qu’internet peut nous offrir. Il existe beaucoup de ressources gratuites en ligne. Grâce à internet on accède à du contenu riche et on peut proposer les meilleurs cours du monde. Il faut plutôt apprendre à chercher les informations, les décortiquer, les compétences de veille et d’analyse sont importantes. Autre problématique, les cursus classiques évoluent assez lentement. Dans le domaine du numérique, les choses évoluent rapidement. Dans notre école on modifie le programme tous les 6 mois. Nous sommes donc très agiles alors que pour l’Education Nationale, réformer le programme scolaire prend beaucoup plus de temps…

5. Comment changer la donne ? A quoi ressemblera selon vous l’éducation du futur ?

Tout d’abord, sur le plan organisationnel, on ne cesse de voir apparaître des écoles de commerce avec énormément d’étudiants. Même à l’université les effectifs des classes sont très extensibles. Néanmoins ce n’est pas une logique pertinente. Il ne faut plus favoriser la création de grosses structures mais plutôt celles de petites unités. En effet, plus les structures sont grandes, et plus il est compliqué de les rendre agiles. Il faut également former les enseignants à des méthodes qui peuvent être adaptées facilement. Autre élément, quand on regarde le secteur éducatif, il y a trop de différenciation sur les manières de valider les acquis par exemple. Il y a une véritable désagrégation des chaînes de valeurs. Avant, l’Université créait les contenus des cours, les délivrait tout au long du cursus et faisait passer les examens. Aujourd’hui, on peut avoir des acteurs qui vont créer des contenus et d’autres qui vont faire passer les examens… chacun se spécialise. En se positionnant sur la chaine de valeurs, on ajoute une plus-value. Le positionnement c’est le futur. Ensuite, la différence entre formation initiale et continue n’aura plus de sens. Demain, les jeunes pourront faire un parcours rapide. C’est-à-dire qu’ils ne suivront pas forcément un Master - qui est davantage une convention qu’une réelle nécessité – mais des parcours de 2/3 ans. Puis ils partiront travailler, pour ensuite revenir étudier quelques années plus tard. Ils se formeraient ainsi tous les 2/3 ans pendant 5 mois. Cela leur permettrait de garder un lien avec la vie professionnelle et de casser les murs entre formation initiale et continue. Enfin, dans le futur, modularité et mobilité entre établissements et formations seront possibles. On pourra changer d’avis plusieurs fois, essayer plusieurs cursus. Mon rêve serait d’avoir plusieurs écoles un peu partout. Nos étudiants pourraient aller étudier partout, choisir entre une grande variété de cours sur différents campus.

6. Pensez-vous qu’il faudrait apprendre le code dès l’école maternelle ?

Non, je ne pense pas. J’ai des enfants en bas âge, ça les fascine le code mais ils doivent d’abord apprendre à lire et à écrire. Mais il faudrait les initier à la pensée algorithmique, leur montrer la bonne approche pour la résolution des problèmes pour ne pas qu’ils aient peur des problèmes inconnus. Par contre, il faudrait commencer à enseigner le code à partir du collège. Les petits génies du code ont 12/13 ans.

7. Vous êtes speaker à la JFD cette année. Pensez-vous que l’on peut aussi former les femmes à devenir entrepreneure ?

Bien sûr, on peut former femmes et hommes, il n’y a pas de raison qu’on ne forme pas les deux. Aujourd’hui il existe une réelle appréhension vis-à-vis des femmes entrepreneures et codeuses. L’entrepreneuriat manque de vision féminine et c’est dommage. On a besoin de diversité de regards. On a besoin de femmes entrepreneures.

8. Quel est votre regard sur l’avenir de la femme dans notre société ?

Les femmes sont indispensables, chacun a sa place. L’enjeu aujourd’hui pour la réussite des femmes est leur participation pleine et entière, qu’elles arrivent à réaliser leurs rêves sans être encombrées par des contraintes domestiques. Que ce soit des entraves réelles ou par anticipation : par exemple « je ne peux pas me lancer maintenant parce que je veux avoir des enfants dans un futur proche. » Pour y arriver, il faudra partager la responsabilité avec les hommes ! Cela changera quand les hommes passeront plus de temps avec les enfants.

Merci Anna !

Le conseil Hiscox :

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