Services à distance, coaching, e-commerce : les business qui marchent hors de France

Services à distance, coaching, e-commerce les business qui marchent hors de France

Publié le 22/09/2025 11:00 | Mis à jour le 20/10/2025 12:05 | 6 min de lecture

Exporter ses services ou ses produits ouvre des perspectives réelles… à condition d’anticiper. Voici un guide concret, pensé pour micro-entrepreneurs, pour tester un nouveau marché, sécuriser vos démarches et éviter les pièges administratifs — que vous vendiez dans l’Union européenne (UE) ou hors UE.

1) Valider le marché avant d’y investir 1 €

Faites votre benchmark local. Listez 5 à 10 concurrents directs : offre, prix, promesses, canaux d’acquisition (SEO, plateformes, réseaux sociaux, places de marché). Repérez où se réunissent les pros (salons, Slack/Discord/Meetup, marketplaces B2B), et comment les clients achètent (distributeurs, revendeurs, vente directe en ligne, appels d’offres).

Projetez le “go-to-market” dans la vraie vie :

  • Ciblage géographique : quartier/ville si point de vente, fuseau horaire si prestation à distance.
  • Logistique : délais, retours, SAV.
  • Monnaie et paiement : proposez au minimum carte + virement + une solution locale (ex. iDEAL aux Pays-Bas, Giropay en Allemagne).
  • Preuve de demande : démarrez par un MVP export (offre limitée, pré-commande, test de prix) plutôt qu’un déploiement lourd.

Adaptez vos usages au pays. Les codes de négociation, le rythme des échanges et les références culturelles varient. Un détail non maîtrisé peut fermer des portes. Misez sur la sobriété : pitch clair, documents traduits par un pro, mentions légales locales, références et cas concrets.

2) Tisser un réseau utile (qui répond quand ça chauffe)

Partenaire local (fournisseur, revendeur, agent commercial) : il accélère vos mises en relation, contextualise vos prix et vous alerte sur les pratiques locales.

Communautés francophones et réseaux de pros : groupes d’expatriés, chambres de commerce, French Tech/French Fab, Bpifrance/Team France Export. Posez des questions précises : délais réels d’ouverture de compte, prestataires réactifs, coûts cachés.

Langues : l’anglais opérationnel est un minimum pour vendre, facturer, gérer un litige. Apprendre quelques bases locales crée de la proximité et aide hors des grandes villes.

3) Comptabilité et fiscalité : ce qui change dès que vous franchissez une frontière

Dans l’Union européenne

Numéro de TVA intracommunautaire.

  • Services B2B : indispensable. Vous mentionnez votre n° et celui du client.
  • Biens : demandez le n° si vous achetez > 10 000 € HT/an dans l’UE ou si vous optez pour la TVA.

Factures “intra-UE” (B2B) : pas de TVA française si conditions remplies, mention “autoliquidation par le preneur” + vos deux numéros de TVA + référence à la directive.

DES (Déclaration européenne de services) : mensuelle, à déposer au plus tard le 10ᵉ jour ouvrable suivant le mois des prestations B2B dans l’UE.

Biens : fin de la DEB remplacée par :

  • Un état récapitulatif TVA (livraisons intra-UE, dès 1 €),
  • Une enquête statistique si vous figurez dans l’échantillon de l’INSEE/Douanes (réponse mensuelle).

E-invoicing / E-reporting (calendrier France)

  • 1ᵉʳ sept. 2026 : obligation de recevoir des factures électroniques pour les opérations domestiques.
  • 1ᵉʳ sept. 2027 : obligation d’émettre des factures électroniques domestiques et de transmettre certaines données d’opérations hors France via e-reporting.
  • Plateforme obligatoire : Chorus Pro (portail public) ou PDP (plateforme partenaire certifiée). Anticipez le choix et l’intégration (outil de facturation, exports, archivage).
Hors Union Européenne

Numéro EORI (douanes) à obtenir avant toute import/export. Évolution annoncée : bascule vers FR + SIREN (pensez à régulariser si vous avez un EORI par SIRET).

Export : déclaration en douane dématérialisée obligatoire pour toute sortie du territoire douanier.

Import : vous pouvez déclarer vous-même ou passer par un Représentant en Douane Enregistré (RDE). TVA à l’import : due à la DGFIP via votre déclaration (régularité des flux = fiabilité bancaire).

Contrôlez les restrictions (produits sensibles, normes, marquage, points d’inspection).

4) Contrats, risques et conformité : la trousse de secours

  • Contrat bilingue avec droit applicable et juridiction compétente clairement indiqués.
  • Incoterms (EXW, DDP, etc.) : définissent transport, assurance, douane, transfert de risques.
  • RGPD : si vous ciblez des résidents UE, consentements et DPA (accords sous-traitants) restent requis, même depuis l’étranger.
  • Assurance RC Pro + cyber : ventes SaaS, e-commerce, fichiers clients : couvrez perte de données, interruption, défense.
  • Devise & change : formalisez clauses de fluctuation ou indexation (évitez de rogner vos marges).
  • Moyens de preuve : archivez BON de commande, acceptation des CGV, preuve de livraison.

5) Stratégies d’entrée : pas de “grands soirs”, des séquences

Approche “test & learn”
  • Phase découverte (1–3 mois) : prospection ciblée, offres pilotes, partenariats de visibilité.
  • Phase traction (3–6 mois) : mini-budget pub local, PR locale, contenus traduits, 1 revendeur.
  • Phase structuration : référents support, SLA horaires adaptés, flux facturation e-reporting prêts.
Canaux efficaces à petit budget
  • Marketplaces B2B/B2C (Etsy/eBay/ManoMano/ThemeForest selon métier).
  • Co-marketing avec un acteur établi (webinaire, bundle, code promo commun).
  • Résident digital : site en langue locale, pages de confiance (mentions, avis), prix TTC local si applicable, FAQ retours/délais.

6) Quoi vendre à l’étranger quand on est micro ?

Services numériques : développement, intégration IA, UX/UI, montage vidéo, community management, rédaction/traduction multilingue. Forte demande, livraison à distance, cycles de vente courts.

Commerce en ligne & artisanat : bijoux, déco, textile sur plateformes internationales. Soignez photos, délais, retours et réglementations produit (cosmétiques, jouets, aliments : vérifier normes).

Coaching/formation à distance : business, langues, bien-être. Preuve d’expertise (portfolio, cas, avis), contrats clairs (périmètre, calendrier, droits d’usage).

7) Pays “passerelles” (exemples et usages)

  • Danemark : environnement très fluide, forte culture services/tech. Process rapides, exigence qualité/éthique.
  • Singapour : hub Asie, cadre juridique sûr, coûts d’entrée non négligeables ; viser B2B premium, logistique Asie-Pacifique.
  • Nouvelle-Zélande / Australie : procédures limpides, marchés tertiarisation forte, fuseaux horaires à intégrer pour le support.
  • Corée du Sud : appétence produits tech/design, consommateurs exigeants, réactivité et fiabilité très valorisées.
  • Afrique du Sud : porte d’entrée Afrique australe, finance/IT dynamiques, prévoir délais administratifs et sécuriser contrats.

Astuce : dans tout nouveau pays, gardez le siège en France au début (micro-entreprise), et sous-traitez localement via partenaires ; basculez de modèle seulement si le volume récurrent le justifie.

8) Check-list export du micro-entrepreneur

Avant de vendre
  • N° TVA intracom (si services B2B UE / seuils biens) et procédure DES prête.
  • EORI actif (hors UE), RDE identifié si besoin.
  • Outil de facturation compatible plateforme certifiée (Chorus Pro/PDP) pour 2026–2027.
  • CGV export, modèles de devis/factures (mentions UE/hors UE), contrats bilingues.
  • Assurances (RC Pro, cyber), moyens de paiement locaux, policy change.
Au démarrage
  • Offre pilote (pack découverte, essai limité).
  • Support sur un créneau horaire étendu couvrant le fuseau principal.
  • KPI exports : coût d’acquisition, panier, marge nette après change, taux de réachat, délai d’encaissement.
En routine
  • DES mensuelle (UE services), état récap TVA pour livraisons intra-UE de biens si concerné.
  • Archivage et journal des incidents (retours, litiges, pannes) pour prouver votre bonne foi.
  • Amélioration continue : retours clients, A/B test prix/messages, ajout d’un second canal.

9) Erreurs qui coûtent cher (et comment les éviter)

  • Vendre sans mentions légales adaptées : expose à des litiges évitables. Modèle localisé indispensable.
  • Oublier la DES : rappel, c’est mensuel pour services B2B intra-UE.
  • Incoterms flous : vous payez sans le savoir transport/assurance/douane ; choisissez et écrivez-les.
  • Sous-estimer le change : spread bancaire qui mange la marge ; utilisez un compte multi-devises et verrouillez vos prix.
  • Support inexistant aux horaires du client : perte de dossiers. Décalez un créneau, ou externalisez.

10) Où se faire aider (gratuit ou presque)

  • Bpifrance / Team France Export : ateliers, diagnostics, mises en relation.
  • CCI & Chambres binationales : premiers contacts marché, listes de prestataires (avocats, experts-comptables, RDE).
  • Douane.gouv.fr : DES, procédures import/export, EORI, états récapitulatifs.
  • Réseaux pros : French Tech, incubateurs, communautés freelances locales.

En résumé

  • Commencez petit, testez vite (offre pilote, 1–2 canaux).
  • Sécurisez l’administratif : TVA intra-UE, DES, EORI, mentions “autoliquidation”, e-invoicing/e-reporting 2026–2027 via une plateforme certifiée.
  • Outillez contrats et risques : incoterms, clauses change, assurance, RGPD.
  • Investissez dans le réseau local et un support aux bons horaires.

Avec ces bases, l’export cesse d’être un saut dans le vide : vous gardez votre marge, vous gagnez en crédibilité et vous transformez un test à l’étranger en revenu récurrent.